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emmanuel macron - Page 10

  • Fascistométrie et rééducation des masses...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de François-Bernard Huyghe, cueilli sur son site Huyghe.fr et consacré aux tentatives, grossières, du système politico-médiatique d'assimiler la vague populiste à une résurgence du fascisme... Spécialiste de la guerre de l'information, François Bernard Huyghe, auteur de nombreux livres, a récemment publié La désinformation - Les armes du faux (Armand Colin, 2015) et Fake news - La grande peur (VA Press, 2018).

     

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    Fascistométrie et rééducation des masses

    Les années trente reviennent, paraît-il. Certes les esprits tatillons, très « vieux monde », pourraient trouver quelques différences mineures : une guerre mondiale encore fraîche avec ses millions de morts et ses anciens combattants au désespoir, une crise économique pré-keynésienne notamment dans une Allemagne ruinée et saisie par un chute folle de la monnaie, des revendications territoriales (ou des occupations) entre pays européens, le péril bolchévique qui terrifiait sur fond de grèves ou d’émeutes, des gens armés en chemise de couleur se battant partout, les puissances d’une Europe divisée reposant sur leur colonies, guère de concurrence économique d’Asie mais aussi guère d’État providence, réarmement partout, des migrations essentiellement inter-européennes, des sociétés encore largement chrétiennes et rurales, un nationalisme assumé par les classes dirigeante à rebours ce qu’elles professent aujourd’hui, des gouvernements très instables, la montée de partis politiques totalitaires s’assumant comme tels… Passons.

    Chacun a bien compris qu’Emmanuel Macron jouait sur le point Godwin en nous suggérant un quasi retour du fascisme contre lequel il serait le dernier rempart. Fascisme est pour le moins un terme polysémique et nous nous sommes livrés à un petit test comparatif. En Italie puisque l’épouvantail Salvini est si souvent évoqué.

    Prenons d’abord un définition « classique » par Umberto Eco qui, en 1995, énonce quatorze caractéristiques sinon de tous les fascismes, du moins du fascisme comme « ur-fascsimo », archétype (plutôt un schéma d’un fascisme absolu ou poussé à l’extrême, même si chaque fascisme particulier diverge légèrement par rapport à lui) :

    - Culte de la tradition
    - Refus du monde moderne
    - Culte de l’action pour l’action
    - Refus de l’esprit critique
    - Culte de l’unité du peuple
    - Appui sur les classes moyennes
    - Obsession du complot
    - Exaltation de la lutte contre un ennemi surpuissant
    - Rejet de tout pacifisme comme trahison
    - Élitisme de masse (notre communauté est supérieure)
    - Culte du héros
    - Machisme
    - Droits des peuples contre droits des individus
    - Recours à un néo-langage porteur de forts contenus idéologiques

    Nous pourrions discuter chacun de ces points et nous demander plus en détail lesquels s’appliqueraient au stalinisme ou au maoïsme et lesquels seraient vraiment typiques de Salvini. Mais admettons qu’il s’agit d’un idéal-type, de tendances poussées à l’extrême et reconnaissons qu’Eco propose au moins des catégories significatives.

    Petite comparaison avec un texte qui fait grand bruit en Italie vingt-trois ans plus tard L’Espresso publie en ligne un test intitulé « fascistometro » donc destiné à mesurer le degré de fascisme du lecteur suivant son nombre de réponses positives ou d’approbation à 56 affirmations. Ces affirmations que nous n’avons pas la place de reproduire ici peuvent apparaître comme de bon gros lieux communs, mais sont présentés par l’hebdomadaire centriste comme autant d’étapes sur le chemin qui nous mènerait aux années les plus sombres.

    Quelques exemples :
    - l’Italie est un pays ingouvernable
    - Il nous faudrait un régime présidentiel
    - Les journalistes sont tous au service du pouvoir
    - Je vous rappelle que ces gens-là votent
    - Il faudrait les recenser
    - Je pense à nos garçons des forces armées
    - C’est facile de parler quand on est bien au chaud
    - Un pays sans frontière n’est pas un pays.
    - Etc.

    Le lecteur pourra consulter la liste complète, et, s’il le veut, procéder au test. On lui accordera que les phrases ne sont pas d’une immense finesse (cela dit : essayez d’inverser - un pays sans frontière est un pays, l’Italie est un pays gouvernable, je ne pense pas à nos garçons des forces armées, c’est courageux de parler quand on est bien au chaud- et faites vous des copains…) . Certes, nous ne cherchons pas à démontrer que les rédacteurs de l’Espresso (la romancière M. Murgia qui a rédigé le test) sont légèrement moins fins que l’auteur du « Nom de la rose ». Il y a une terrible différence de registre. Analyser le fascisme pour Eco, c’est penser quelques catégories fondamentales d’où découlent des attitudes. Pour L’Espresso c’est criminaliser des phrases de bistrot, avec une bonne dose de mépris de classe. C’est accessoirement culpabiliser des réactions populaires spontanées pour y dénoncer le germe de la nouvelle lèpre. Le fascisme le produit spontané de la niaiserie des masses : difficile de faire plus contre-productif.
    Du reste, Mme Murgia publie en ce moment avec H. Janeczek intitulés « Attention au fascisme qui vit en vous ». L’idée est claire. Nous sommes tous potentiellement fascistes. Racismes et violences sont universels (ce serait donc une pulsion de nature et non une construction de quelques cultures dominantes ?). Il faut donc apprendre à s’autoanalyser et à s’autodiscipliner. Dressage et repentance. Le problème du fascisme n’est pas un problème politique, c’est un problème psychanalytique.Vigilance, camarades, dressons un barrage contre les pulsions des masses.

    Proposition de test pour L’Espresso :
    « Si vous étiez un fasciste désireux de gagner les prochaines élections que feriez vous aux électeurs ?

    A) Je leur enverrais des gens en uniforme leur parler de dieux antiques, de mort au combat, de mobilisation totale du peuple tout entier, de la prochaine guerre à entreprendre contre un adversaire surpuissant...
    B) Je leur ferais lire L’Espresso pour les persuader que ceux qui souhaiteraient plus d’emplois pour leurs concitoyens ou qui critiquent les fonctionnaires sont des nôtres : la preuve que le ventre est encore fécond d’où est sortie la bête immonde
    C) je traduis le clip gouvernemental français (évoqué à l’article précédent)
    D ) Je reprends les slogans psys de Mai 68 sur la libération de la parole et je crie « à bas le Surmoi ».

    François-Bernard Huyghe (Huyghe.fr, 3 novembre 2018)

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  • Les snipers de la semaine... (169)

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    Au sommaire cette semaine :

    - sur son site, Michel Onfray rafale Emmanuel Macron après sa photo prise avec des voyous antillais...

    Lettre à Manu sur le doigté et son fondement

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    - sur Vu du droit, Régis de Castelnau dézingue Le Monde après son article sur Patrick Jardin, père d'une victime du Bataclan...

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  • La Caste...

    Les éditions La Découverte viennent de publier une enquête de Laurent Mauduit intitulée La Caste. Journaliste passé par le Quotidien de Paris, Libération et Le Monde, Laurent Mauduit est un des fondateurs de Mediapart.

     

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    En vingt ans s'est constituée en France une véritable oligarchie vertébrée notamment par l'Inspection des finances. Fonctionnant comme une caste, cette oligarchie capitaliste s'est installée pour durer, en occupant les postes clés de l'État, pour imposer ses vues et ses réformes néolibérales. Quelle est la vraie nature de ce pouvoir dont Emmanuel Macron est l'étendard ? Histoire de la trahison des élites publiques françaises.

    L'accession au pouvoir d'Emmanuel Macron n'est pas seulement la conséquence d'un séisme historique, qui a vu l'implosion du Parti socialiste et du parti Les Républicains. C'est aussi l'aboutissement de l'histoire longue de la haute fonction publique, qui a cessé de défendre l'intérêt général pour se battre en faveur de ses seuls intérêts.
    Pour comprendre cette sécession des élites publiques et décrypter les débuts du nouveau quinquennat, il faut savoir comment la caste a d'abord réalisé, grâce aux privatisations, un hold-up à son profit sur une bonne partie du CAC 40 ; puis comment, par le jeu des pantouflages ou de rétropantouflages, elle est parvenue à privatiser quelques-uns des postes clés de la République jusqu'à porter l'un des siens au sommet de l'Etat.
    C'est cette enquête que La Caste s'applique à mener, en dressant l'état des lieux du système oligarchique français ; en se plongeant dans les combats engagés par les défenseurs de la République – en 1848, en 1936 ou encore en 1945 –, pour que celle-ci dispose enfin d'une haute fonction publique conforme à ses valeurs.

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  • En finir avec la russophobie pavlovienne...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Joachim Imad cueilli sur Figaro vox et consacré à la russophobie maladive qui sévit en Occident. Dernier épisode en date : utilisant les "analyses" d'une officine de  désinformation, EU Disinfo Lab,  partiellement financée par les réseaux Soros,  nos russophobes obsessionnels ont voulu voir la main de Moscou dans le fort retentissement de l'affaire Benalla sur les réseaux sociaux. Une affirmation tellement grotesque que même les Décodeurs du journal Le Monde ont tenu à la démonter...

     

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    «Bots russes» dans l'affaire Benalla : en finir avec la russophobie pavlovienne

    Dans «The Manchurian Candidate», chef-d'œuvre du réalisateur américain John Frankenheimer sorti en 1962, des experts soviétiques élaborent une machination sournoise pour déstabiliser les États-Unis et y faire triompher l'idéologie communiste. Ceux-ci prennent en otage Raymond Shaw, un soldat américain combattant en Corée, et recourent à l'hypnose et aux drogues afin de le conditionner et de l'inciter à assassiner le président américain. Ce film est profondément révélateur de la paranoïa anti-russe qui sévit alors dans une Amérique tout juste sortie de l'épisode de la chasse aux sorcières sous le sénateur McCarthy.

    Malgré le tournant historique de la fin de la guerre froide, les angoisses liées à la Russie persistent et l'époque tend à se prendre pour une autre. Dans le discours dominant, la Russie est ainsi très souvent présentée comme une puissance tentaculaire, toujours encline à conspirer contre des démocraties occidentales fragiles et fatiguées. La question des prétendues ingérences de Moscou se pose continuellement et les accusations sont légion: soutien à Donald Trump, contribution à la victoire du Brexit et à la montée des velléités indépendantistes en Catalogne, interférence dans la campagne présidentielle française en défaveur d'Emmanuel Macron, etc. À la suite de la publication d'une étude par l'ONG EU DisinfoLab, l'emballement autour de l'affaire Benalla a même été cette semaine imputé à l'activisme numérique de la Russie et d'une «sphère russophile» désireuse de gonfler artificiellement la polémique. Toutes les turpitudes qui frappent les élites occidentales et l'ordre néolibéral seraient ainsi la conséquence de manœuvres russes particulièrement sournoises.

    Il ne s'agit pas évidemment d'être naïf et de nier l'existence de réseaux d'influences russes en Europe ou aux États-Unis. Cela serait d'autant plus absurde que toutes les grandes puissances s'appuient sur leur soft power pour défendre leurs intérêts vitaux à l'étranger et recourent pour cela à des procédés divers. Le problème n'est pas là.

    Il réside tout d'abord dans le fait que les accusations pavloviennes envers la Russie sont souvent malhonnêtes. La capacité d'influence de la Russie, et plus largement sa puissance, sont en permanence surévaluées par les élites occidentales. Celles-ci font fi de toutes les limites de la Russie: budget militaire près de dix fois inférieur à celui de l'OTAN, déclin démographique, économie insuffisamment diversifiée et trop dépendante des hydrocarbures, etc. La Russie n'a ni les ambitions impérialistes qu'on lui prête trop souvent, ni les moyens de ces ambitions. Elle pratique plutôt une politique de défense de ses intérêts dans son voisinage et se veut une puissance d'équilibre dans l'ordre international actuel. D'autres pays vont par ailleurs bien plus loin qu'elle dans l'ingérence à l'étranger, dès lors qu'ils jugent que la direction prise par tel ou tel gouvernement est contraire à leurs intérêts, et ne reculent devant rien, pas même devant le droit international. Les exemples de l'invasion de l'Irak et du renversement de Kadhafi en Libye l'ont bien montré. Mais la force du deux poids deux mesures est telle que les élites occidentales sont plus enclines à fermer les yeux sur certains pays que sur la Russie.

    Si l'on s'arrête par exemple sur la dernière campagne présidentielle américaine, il est raisonnable de penser que la Russie avait intérêt à ce que Donald Trump l'emporte. Son projet d'approfondir et de pacifier les relations russo-américaines contrastait drastiquement avec l'hostilité manifestée par Hillary Clinton à l'encontre de Moscou. Certains réseaux russes ont certes œuvré en faveur de la victoire du candidat républicain mais cela n'a eu qu'une incidence infime sur le résultat final. Rien qui justifiait en tout cas le poids politico-médiatique que l'affaire a pris. Comme le note le chercheur François-Bernard Huyghe, la seule conséquence de la diffusion de supposées «fake news» anti-Clinton a été de conforter dans leur intention de vote des électeurs qui étaient de toute manière déjà en rupture avec l'establishment américain et la candidate démocrate.

    Dans le cas de l'affaire Benalla, les réactions de certains hommes politiques accusant la Russie, à l'image du groupe de centre droit «Agir», ont été tellement virulentes que EU DisinfoLab, l'ONG belge à l'origine de l'affaire, a tenu dans une étude définitive à nuancer ses conclusions initiales et à expliquer qu'il n'y avait pas de preuve d'une ingérence organisée.

    Dans des situations si confuses, la stratégie d'accuser le Kremlin de tous les maux qui minent les «démocraties libérales» est extrêmement dangereuse. Cette propension vise souvent, par le recours à une grille d'analyse du réel bien commode, à absoudre les élites de leurs torts et à éviter que l'on s'interroge sur les conséquences des choix politiques faits par celles-ci au cours des dernières années. Le Brexit découle par exemple de problèmes très profonds et inhérents à la société britannique et à la structure de l'Union européenne: paupérisation de la classe moyenne et mécontentement face aux inégalités, insécurité culturelle et désarroi face à l'immigration, volonté de retrouver une indépendance politique dans une nation construite autour de la souveraineté du Parlement, etc. L'expliquer à travers le prisme des manœuvres russes, c'est faire preuve d'une malhonnêteté confondante.

    Cette russophobie primaire pose enfin un dernier problème majeur dès lors qu'elle justifie que l'on s'attaque à nouveau à une liberté d'expression déjà fortement fragilisée en France depuis quarante ans. La proposition de loi sur les fausses nouvelles prévoit par exemple, dans son troisième article, de permettre au Conseil supérieur de l'audiovisuel de sanctionner, notamment à coups de retraits de licences, les médias étrangers qui pratiquent la «désinformation». Il est évident que cette mesure n'a pas pour cible al-Jazeera mais bien RT et Radio Sputnik, c'est-à-dire des médias subventionnés par le Kremlin avec qui Emmanuel Macron a un contentieux personnel. Le président français les accuse en effet d'avoir comploté afin d'enrayer son ascension au pouvoir. Ainsi, à cause d'une paranoïa anti-russe et au nom d'un concept de «fake news» aux contours extrêmement flous, c'est à l'édifice permettant le débat démocratique et l'exercice des libertés fondamentales que l'on s'attaque. Alors même que le réel ne se laisse jamais saisir à travers un angle unique, des désaccords sur des faits et sur leur interprétation servent de prétexte au pouvoir en place pour incriminer une vision du monde ou pour disqualifier un adversaire idéologique. La politique est ainsi réduite à une lutte entre le camp du vrai, le fameux «cercle de la raison» d'Alain Minc, et des foules manipulées, par Moscou et plus largement par les populistes, et coupables de mal voter.

    Ce dernier point est fondamental car la russophobie presque systématique qui se manifeste aujourd'hui en Occident nous raconte ce qu'est devenue la politique: un affrontement manichéen entre l'humanité et ses ennemis. Parer la Russie des attributs du mal dans sa forme chimiquement pure revient à nier à la fois l'essence de la politique et le fait que la tension entre le bien et le mal se manifeste de façon universelle. C'est peut-être d'ailleurs le penseur russe, Alexandre Soljenitsyne, qui retranscrit le mieux les dangers de cette dérive dans son œuvre L'archipel du Goulag: «Peu à peu, j'ai découvert que la ligne de partage entre le bien et le mal ne sépare ni les États ni les classes ni les partis, mais qu'elle traverse le cœur de chaque homme et de toute l'humanité.»

    Ceux qui nient la complexité du monde, par inquiétude sincère sur l'avenir du libéralisme dans leurs sociétés ou par incapacité à supporter le fait que la Russie se soit relevée de la dislocation de l'URSS, ne servent donc pas le débat démocratique qu'ils prétendent aimer. Ils l'empêchent et contribuent par conséquent à rendre le réel plus obscur.

    En 1991, le conseiller diplomatique de Gorbatchev, Gueorgui Arbatov avait mis en garde les Occidentaux avec la prédiction suivante: «Nous allons vous rendre le pire des services, nous allons vous priver d'ennemi!». Arbatov s'est trompé. L'ennemi russe est encore là. Le complotisme l'est aussi, et pas toujours là où on l'attend.

    Joachim Imad (Figaro Vox, 9 août 2018)

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  • Quinze thèses sur Macron...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jean-Yves Le Gallou cueilli sur Polémia et consacré à la trajectoire d'Emmanuel Macron. Ancien haut-fonctionnaire, président de la Fondation Polémia, Jean-Yves Le Gallou a publié Immigration : la catastrophe - Que faire ? (Via Romana, 2016).

     

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    15 thèses sur Macron

    1- Macron a été invité à la réunion du groupe de Bilderberg en 2014. Bien que collaborateur direct de François Hollande, il en a critiqué l’immobilisme. Et il a souligné en contrepoint ce qu’un « moderniste », tel que lui, pourrait faire. C’est ainsi qu’il est devenu le principal représentant politique de la superclasse mondiale en France.

    2- Lors de la campagne présidentielle de 2017, il a bénéficié d’un soutien sans faille des oligarques français :

    • Les oligarques financiers lui ont ouvert leurs bourses, à Londres notamment.
    • Les oligarques médiatiques ont bâti son image à coup de « storytelling ».
    • Les oligarques judiciaires ont abattu en vol François Fillon, son concurrent le plus dangereux.

    3- C’est vis-à-vis de ces oligarques, et d’eux seuls, que Macron se sent engagé et redevable. En gage de sa loyauté à leur égard il a choisi comme Premier ministre, le Bilderberg (2016) Edouard Philippe. Il met également en œuvre la politique voulue par les oligarques : extension du domaine du marché, abolition des frontières et des limites, déconstruction des identités.

    4- Ainsi, un certains nombre d’actifs publics – aéroports, Engie, Francaise des jeux – sont où seront vendues. Cela ne présente guère d’intérêt économique. Cela dégrade même le bilan de la France puisque ces ventes d’actifs ne sont pas compensées par un désendettement correspondant. Mais cela étend la sphère du marché et le volume d’activités lucratives des banques et des avocats d’affaires.

    5- Dans le même esprit, de nombreux projets de loi ont pour but d’augmenter le nombre des terrains à bâtir et de faciliter les constructions. C’est l’un des objectifs de la loi « Élan » et des tentatives pour écorner la loi littorale et priver d’efficacité le rôle protecteur des architectes des bâtiments de France. Bref, il s’agit de marchandiser davantage les espaces naturels et culturels français.

    6- C’est cette même méthode de marchandisation – cette fois de la vie – qui prévaut avec l’extension de la procréation médiale assistée (PMA) et de la gestation pour autrui (GPA). Dans la même logique d’abolition des limites naturelles, le Gouvernement et le Parlement travaillent à l’extension de l’euthanasie.

    7- 2017 a été une année record pour l’immigration en France avec plus de 412 000 entrées recensées ( 262000 titres de séjour délivrés ; 100000 demandes d’asile ; 50000 « mineurs » isolés). Loin d’essayer de limiter ce déferlement, Emmanuel Macron s’oppose aux pays européens (Autriche, Italie, Hongrie) qui veulent reprendre le contrôle de la situation.

    8- Sur le plan fiscal et social, la politique de Macron s’inscrit dans une vision individualiste de déconstruction des liens sociaux avec deux réformes phares : le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu (préalable à la disparition du quotient familial) et la remise en cause des pensions de réversion.

    9- Cette politique suscite un rejet croissant de la part :

    • Des Français attachés aux valeurs traditionnelles et à l’identité,
    • Mais aussi des classes moyennes victimes d’un acharnement fiscal, rendu nécessaire par la défiscalisation des hyper riches et les transferts sociaux au profit de l’immigration,
    • Et enfin des classes populaires frappées de plein fouet dans leur mode de vie et leurs salaires par la préférence immigrée et la « discrimination positive », c’est à dire négative pour eux.

    10- Macron n’a cure de ce mécontentement car ses vrais mandants sont les oligarques de la superclasse mondiale, non le peuple français qu’il s’agit d’ahurir par la propagande, le contrôle des médias et la censure.

    11- La communication de Macron repose sur la saturation de l’espace médiatique. Par une mise en scène de sa présence (et de celle de «Brigitte ») et un discours construit sur le « et en même temps » qui permet d’envoyer des signaux dans toutes les directions. Signaux le plus souvent sans conséquences pratiques.

    12- Ceci s’accompagne d’un contrôle accru des grands médias soit publics, soit privés : à travers les gens directement nommés par le pouvoir ou par les oligarques et à travers le CSA. Sans oublier l’élimination des voix dissonantes comme Zemmour ou Taddei.

    13- Il faut enfin souligner la mise en place d’une censure d’Etat avec le projet de loi sur les «fake news » et la labélisation de médias officiels. Macron a les ambitions du Big Brother d’Orwell.

    14- Ce verrouillage médiatique est complété par une manœuvre politique visant à occuper tout l’espace central en détruisant Les Républicains, notamment grâce au Wauquiez bashing des médias, et à n’avoir comme opposants que Mélenchon et Marine Le Pen à la crédibilité politique ou personnelle faible.

    15- Il n’est pas certain pourtant que tout ceci suffise à Macron pour garder la main. D’autant qu’il l’a déjà perdu sur la scène internationale : pour Trump comme pour Poutine, c’est un ludion qui « fait des coups » mais qui ne compte guère. Et, sur la scène européenne, il est de plus en plus isolé face à la déferlante identitaire et populiste.

    « Jupiter » devrait savoir que la Roche Tarpéienne est près du Capitole.

     

    Jean-Yves Le Gallou (Polémia, 20 juillet 2018)

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  • Emmanuel Macron, le contre-populiste...

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire, dans lequel il évoque la politique d'Emmanuel Macron... Philosophe et essayiste, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Ce que penser veut dire (Rocher, 2017) et L'écriture runique et les origines de l'écriture (Yoran, 2017).

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    Alain de Benoist : « Contrairement aux apparences, Emmanuel Macron est un contre-populiste ! »

    Voilà un an qu’Emmanuel Macron, le Président que personne n’avait vu venir, est à l’Élysée. Que sait-on, maintenant, sur lui ? Peut-on dresser un premier bilan de son action ?

    Macron a eu beaucoup de chance. Mais il faut reconnaître qu’il a su forcer la chance. Il a parfaitement mesuré l’envie de « dégagisme », de renouvellement, mais aussi de « verticalité », qui montait dans l’opinion depuis des années. Instruit par l’expérience de ses prédécesseurs, dont il ne veut pas répéter les fautes, il a parfaitement compris que les vieux partis institutionnels ont fait leur temps et que le clivage droite-gauche ne veut plus dire grand-chose dès lors qu’il ne renvoie plus qu’à une « alternance unique ». C’est ce qui lui a permis de réussir là où Giscard et Rocard avaient échoué : regrouper au « centre » les libéraux de gauche et de droite acquis à la mondialisation.

    Sur le plan de la personnalité, Macron est un libéral autoritaire, absolument pas un moraliste « humaniste » (il est aussi dénué de scrupules que Sarkozy, et s’il a fait appel à Jean-Michel Blanquer, c’est avant tout pour adapter l’école aux exigences de l’entreprise). « Agnostique » sur les problèmes de société, c’est un homme qui n’a pas d’amis mais seulement des conseillers techniques, qui a réussi à faire de ses ministres des employés et de sa majorité parlementaire une armée de zombies, simple reflet de son électorat. Le « macronisme », c’est Macron et rien d’autre.

    Sa façon de gouverner est typique du style managérial : apparaître sympathique, ouvert et détendu, aller « au contact », favoriser par principe le « dialogue » et la « délibération », mais sans jamais dévier d’un pouce de ce qu’il a décidé par avance. En d’autres termes, parler avec tout le monde mais n’écouter personne. Main de fer et sourire commercial. C’est ainsi qu’il est arrivé à faire passer sa loi de « moralisation de la vie politique », puis la réforme du Code du travail, puis celle de la SNCF, en attendant celles de l’audiovisuel public, des retraites et de la fiscalité.

    À sa manière, n’est-il pas, lui aussi, un populiste ?

    Je le définirais plutôt comme un contre-populiste. Il a opéré pour la classe dominante le regroupement que les populistes tentent de réaliser à la base. Dans son vocabulaire, le clivage principal est désormais celui qui oppose les « progressistes » aux « conservateurs ». Les premiers sont tout simplement les libéraux, les seconds ceux qui restent attachés à des valeurs ou des principes que l’individualisme moderne n’a pas encore liquidés.

    L’objectif qu’il s’est fixé est simple : réformer la France pour l’adapter aux exigences de la modernité libérale. Et pour ce faire, parier sur les ambitions et les initiatives individuelles des « premiers de cordée » plutôt que sur les énergies et les passions collectives. Cette volonté d’être en phase avec l’idéologie dominante est le cœur même de sa doctrine. « L’article un du macronisme, c’est l’européisme », constatait récemment Marcel Gauchet. L’idée sous-jacente est celle énoncée jadis par Margaret Thatcher : « Il n’y a pas d’alternative. »

    Comme l’a écrit Paul Thibaud, « Macron considère la France de l’extérieur, à partir de l’universalisme direct où il s’est établi. » Il reconnaît, certes, à l’appartenance nationale une valeur sentimentale, mais la réduit à sa capacité d’adaptation au milieu ambiant. La France n’est pas, pour lui, le support d’une identité commune, mais une quasi-entreprise (une « start-up ») qui doit avant tout se tourner vers l’avenir et à laquelle il faut donner toutes ses chances de réussir, fût-ce au détriment des perdants, étant entendu que sa capacité à réussir implique son alignement sur les critères de Maastricht, ce qui ne peut qu’aboutir à toujours plus de précarité, de dévaluation salariale, de difficulté à vivre pour cette partie grandissante de la population qui n’appartient pas aux secteurs compétitifs insérés dans la mondialisation. D’où sa réputation justifiée de « Président des riches » – mais sans doute faudrait-il plutôt dire de « Président des gagnants ». Les nouvelles fractures politico-sociales ne peuvent donc que s’aggraver.

    Quelles sont les chances de l’opposition ?

    Déjà assuré d’une majorité aux ordres, Macron n’a de surcroît aucune opposition crédible face à lui, ce qui est à peu près inédit dans notre histoire. Il gouverne de manière d’autant plus autoritaire qu’il manœuvre dans un champ de ruines. À gauche, le Parti socialiste ne parvient toujours pas à se relever, tandis que La France insoumise se divise de plus en plus entre les lignes d’Alexis Corbière et de Clémentine Autain ; c’est-à-dire entre partisans d’une forme de populisme inspirée de Podemos, qui veulent « fédérer le peuple », et ceux qui veulent surtout ne pas se couper des « forces de gauche ». Mélenchon fait partie des premiers, mais il ne peut aller jusqu’au bout de sa démarche, car cela l’obligerait à un changement de cap radical à propos de l’immigration.

    À droite, la concurrence des appareils de partis ruine toute tentative d’union. Certes, la porosité est plus grande à la base, mais cela reste limité au plan local. À l’échelon national, il manque une figure charismatique nouvelle, susceptible de rallier aussi bien les classes moyennes que les classes populaires, rôle que ne peuvent tenir, pour des raisons différentes, ni Marine Le Pen ni Nicolas Dupont-Aignan ni Laurent Wauquiez. Sans une telle figure, tous les efforts de la « droite hors les murs » resteront vains. Il manque aussi, et peut-être surtout, l’aggiornamento doctrinal qui permettrait à cette droite de congédier une fois pour toutes la tentation libérale qui, de pair avec l’opportunisme, pousse tant de Républicains à rejoindre les rangs macroniens au motif qu’après tout, Macron réalise ce qu’ils voulaient faire eux-mêmes depuis longtemps.

    Certains espèrent que, lorsque le macronisme aura commencé à décliner, le vieux paysage politique bipolaire va renaître de ses cendres après lui. Je ne le crois pas un instant. L’élection de Macron a engagé un processus de recomposition générale sur lequel on n’est pas près de revenir. C’est en cela que réside son caractère historique.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Gauthier, 15 juin 2018)

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